La Politesse, tu connais ?! [PV LEE JUNG BOK]

Assis sur un banc dans un parc près de l'agence, Taiki venait de terminer une conversation téléphonique avec sa mère. Il aimait prendre des nouvelles de ses parents régulièrement et elle, ne pouvait s'empêcher de s'inquiéter pour lui. On était vendredi, jour où elle, ses 3 sœurs et son frère rendaient visite à leurs parents, les grands-parents de Taiki. C'était une habitude qu'ils ont tous pris depuis des années : le vendredi à partir de 16h, les enfants venaient s'ils le pouvaient après le travail, et leur mère préparait toujours un dessert que tout le monde dégustait autour d'une grande table. Taiki, depuis ses 12 ans, venait tous les vendredis sans exception, à la sortie de l'école. Il a toujours aimé cette ambiance conviviale où tous parlaient de tout et de rien, et riaient pour n'importe quoi. C'était un moment qu'il ne voulait jamais manquer. Il adorait ça. Chacun racontait ce qui lui était arrivé dans la semaine et Taiki écoutait tranquillement avec son grand bol de chocolat chaud entre les mains. Ça lui arrivait souvent de venir leur montrer ses progrès avec Jun, ils ont toujours été son premier public.

Il commençait à réaliser que sa famille lui manquait. Sa mère, son père, sa grand-mère, son grand-père, tous ! Et même le Japon ! Quand sa mère commençait à lui raconter les déboires de son oncle avec sa voiture, la joie d'une de ses tantes avec la venue d'un bébé, l'impatience d'une autre à partir à la retraite et la maladresse de la dernière qui a failli se blesser gravement, il se rendait compte à quel point ne plus les entendre parler de tout cela, le rendait un peu... seul. Isolé de sa famille qui lui tenait tant à cœur. Il a toujours eu du mal à se détacher de ce cocon chaleureux et il sait que ce lien sera toujours très important à ses yeux. Mais aujourd'hui, tout d'un coup, il trouve que ceux qui sont tout au bout de ce lien se retrouvent très éloignés de lui. Est-ce cela que l'on appelle le mal du pays ? Sans doute, car pendant que sa mère lui parlait, à travers son sourire scotché au téléphone, une larme glissa sur sa joue. Pas une larme de tristesse, une larme de joie d'entendre à nouveau sa voix. Bien sûr, il ne laissait rien transparaître dans la sienne, il ne voulait pas davantage la préoccuper, sinon elle serait bien capable de venir jusqu'en Corée pour être sûre qu'il aille bien. Et son père la suivrait sans doute, avec sa vieille guitare et viendrait lui changer les idées en lui proposant un duo comme avant. Ses parents étaient les meilleurs et maintenant, Taiki se sentait d'humeur mélancolique en se remémorant ces quelques souvenirs. La tête penchée sur son téléphone, il essayait de se chasser ce sentiment qu'il n'aimait pas ressentir. La mélancolie le rendait à fleur de peau ou au contraire, il devenait... piquant, froid, et silencieux mais heureusement pour ceux qui l'entouraient, ce n'était que pendant une courte durée. Mais même si c'était pendant une courte durée, ce n'était pas très agréable, que ce soit pour lui ou pour les autres. Seuls sa famille et ses amis étaient au courant de ses brusques et éphémères changements d'humeur, et savaient qu'il valait mieux le laisser tranquille dans ces moments-là. Un jour, il avait essayé d'analyser cela, et il s'était dit qu'il ne voulait pas qu'on le voit triste, désemparé alors cette carapace piquante venait le recouvrir, le temps qu'il se remette. Oui, ça devait être sans doute pour ça. Et celle-ci venait juste d'apparaître.

Il se leva du banc et se décida à se balader un petit peu. Il savait exactement comment rendre son humeur plus sympathique : la musique. Elle arrivait toujours à le sortir de sa tourmente. Il tâta son sac à la recherche de son casque, oui il était là, il ne l'avait pas oublié. Il attrapa son mp3, suspendu dans le vide, plaça son casque sur ses oreilles et appuya sur PLAY.
Du heavy métal, voilà la première musique qui frappa sa mélancolie et sa carapace, ce qui la renforça. Un peu trop... agressif ? Non, peut-être trop déchaîné pour maintenant. Il avait besoin de rire, de quelque chose de joyeux, de divertissant qui lui donne l'envie de danser bêtement au milieu du parc ! Voilà ce qu'il avait besoin ! Mais il resta sur cette musique, qui étrangement le rendait plus sûr de lui, plus fort, plus arrogant, il avait l'impression qu'on lui criait « Bats-toi ! » et dans sa tête, il avait cette phrase en boucle « Ne m'adressez pas la parole, je ne suis pas encore de bonne compagnie. ». Tout d'un coup, il marchait avec plus d'assurance. Cette chanson n'allait pas beaucoup l'aider mais il l'aimait bien alors il la laissa jouer en entier. Sa tête s'agita, suivant le rythme rapide de la musique. Il commençait à imiter la voix du chanteur, scandant les paroles en anglais :



Il lui fallait du sucre, ça le calmerait sûrement. Ça lui apportait souvent du réconfort. Il sortit sa boîte de chewing-gum, la secoua, il n'en restait plus qu'un seul. Celui-là était destiné à lui égayer sa journée, pensa t-il. Il s'apprêtait à le mettre dans sa bouche quand quelqu'un le bouscula. Son chewing-gum tomba par terre, pile dans une flaque. L'inconnu, n'avait rien dit, pas même une excuse. Rien. Taiki s'était arrêté, fixant son chewing-gum par terre. Un juron lui passa entre les lèvres, et cela n'était guère dans ses habitudes « Fais chier... ». Il abaissa son casque, la musique résonnait désormais dans son cou et le volume était au maximum. Sa mauvaise humeur venait d'atteindre un nouveau palier. Il se retourna brusquement et trouva facilement du regard l'impoli qui s'en allait.

- « Et toi...toi là...Excuse-moi mais... Il ne semblait pas l'entendre, ce qui l'énerva d'autant plus. HEY TOI LA ! Vous ne connaissez donc pas la politesse en Corée ? Quand on bouscule quelqu'un, on s'excuse, tout simplement. C'est si difficile que ça ?! » cria t-il en direction du garçon blond qui se tenait à quelques mètres devant lui.

Une petite voix (conscience bonjour) se glissa au travers de la musique et lui lança ironiquement « Dis-donc toi, ce n'est pas toi qui déteste les conflits ? » Oh et merde, fallait pas venir me bousculer à ce moment-là. Il est mal tombé c'est tout. Il se rendait compte à quel point la musique changeait ou détériorait son humeur avec facilité. N'est-elle pas incroyable ? Elle arrive même à nous faire changer de personnalité ! Désolé, mais je vais avoir du mal à me retenir, surtout s'il nie ou refuse de s'excuser.
Je déteste quand je deviens impulsif...

One… Two… Three… Four… One… Two… Three… Four…

Cette fois-ci tout devait être parfait ! Jusqu’à la fin de la musique JB devait tout donner pour que son enchainement soit parfait. Toute l’après-midi il avait réquisitionné l’une des salles de danse de l’agence afin de pouvoir s’entrainer seul. Aujourd’hui était censé être un jour de repos pour lui, et pour une fois qu’on lui en avait accordé une, il avait refusé de se l’accorder, préférant se perfectionner sur la nouvelle danse que le chorégraphe des SWEET LIAR leur avait confectionné pour leur chanson come-back... JB étant le leader ainsi que le danseur masculin principal du groupe, il se devait d’être parfait. Un seul faux-pas de sa part pouvait avoir une incidence sur la performance du groupe ; et pas seulement ! En réalité JB se fichait un peu du groupe, il ne l’avait même pas intégré de son plein grès de toute manière… Non, lui tout ce qu’il voulait c’était de se faire connaitre par le plus grand nombre de personnes et d’être irréprochable sur le plan artistique pour enfin pouvoir attaquer une carrière solo ; ce qu’il avait toujours souhaité ! Seulement pour l’instant il était encore loin d’être irréprochable dans ses mouvements. Et hop, un faux-pas !

« Aaaaaaah ! » s’énerva-t-il en lançant brutalement la serviette qu’il avait sur ses épaules. Comment pouvait-il encore faire une telle faute alors que cela faisait déjà quatre heures qu’il était sur cet enchainement ? Non, c’était inacceptable ! Il n’avait pas le droit de laisser passer cela ! Il arrêterait de s’entrainer seulement lorsque tout sera impeccable !

Et alors qu’il était décidé à recommencer une énième fois la chorégraphie, la porte de la salle de danse s’ouvrit brusquement sur la personne que JB aimait le moins au monde : son cousin. Celui-ci était accompagné d’une demoiselle qui devait être une des danseuses de l’agence. Mécontent qu’on vienne le déranger à un tel moment, il ne prit pas la peine de regarder son interlocuteur et lança d’une voix sèche :

« Qu’est-ce que tu fous là Jae Wan ?
- C’est comme ça qu’on s’adresse à son Sunbae ? »

Sunbae ? Non mais pour qui se prenait-il ? Déjà que JB n’était pas de très bonne humeur il n’allait pas en rajouter une couche avec son statut de « supériorité » et ses répliques à deux balles ! Il allait finir par l’achever. Le danseur ne dit rien sur le coup, n’en pensant pas moins pour autant, et il remit la musique à distance grâce à la télécommande afin de pouvoir recommencer à exécuter les pas de la chorégraphie. Il aurait aimé que le fait de l’ignorer l’aurait fait partir, mais ce ne fut malheureusement pas le cas. Jae Wan avait tendance à être tenace, aussi tenace que le chanteur des SWEET LIAR l’était. Ce n’était pas pour rien qu’ils étaient cousins après tout.

« Regarde-moi comment il gigote ! » S’adressa Jae à la danseuse qui l’accompagnait pour se moquer de son cadet. « Tu te demandes ce qu’il fait de toutes ses heures d’entrainements pour être aussi mauvais ! »

S’en était trop pour JB ! Le danseur ne supportait plus les remarques de son cousin, lui qui le narguait à chaque fois qu’ils se croisaient. S’ennuyait-il tant que ça pour venir l’emmerder lors de son entrainement ? Le plus jeune des deux cousins se retourna brusquement et se dirigea en direction de son ainé. Il l’attrapa ensuite par le col et le secoua deux fois pour montrer son mécontentement. Mais ce dernier était plus fort et il réussit facilement à se dégager de son emprise.

« Et tu crois franchement que tu arriveras à quelque chose en me secouant comme ça ?
- Sort d’ici tout de suite ! »

Jae Wan lui fit un sourire mesquin et rapprocha lentement sa tête de celle de son cousin.

« Non je ne sortirais pas, si tu n’y vois pas d’inconvénients j’ai besoin de la salle. »

Il se foutait vraiment de lui ! Toutes les autres salles d’entrainements étaient vides et il fallait qu’il vienne réquisitionner celle-là ! Quelle enflure !

« Et les autres salles ne te suffisent plus ?
- Non, cette salle est celle que j’utilise d’habitude.
- Tu es vraiment une ordure ! Ça ne t’a pas suffi de pourrir mon enfance, maintenant il faut que tu viennes m’emmerder avec ta pauvre danseuse. »

La danseuse en question tenta de frapper JB mais ce dernier esquiva d’un simple mouvement. Cela amusa Jae Wan un moment, puis il se ressaisit et afficha un visage plus dur, moins moqueur.

« Fais attention à ce que tu dis ! Tu ne voudrais pas que tout cela ne se retrouve sur internet n’est-ce pas ? Cela pourrait entacher ta réputation ! Et quelle réputation… »

En disant ces derniers mot Jae Wan fit signe d’applaudir, ce qui eut l’effet d’énerver encore plus le danseur. Ce dernier ne pouvait plus se retenir face à temps d’arrogance, il s’était déjà étonné d’avoir tenu aussi longtemps sans en venir aux mains… Mais maintenant c’était foutu. JB assena son cousin d’un coup de poing violent qui le fit se retrouver au sol pendant quelque seconde. Effrayer par la bagarre qui venait de commencer entre les deux cousins la danseuse se mit à hurler d’une voix insupportablement aigue et se mit à courir en direction du bureau du directeur de l’agence… La guerre entre les deux jeunes hommes dura quelques longues secondes entre coups de poings, de pieds et d’insultes. Des membres de l’agence arrivèrent rapidement pour séparer les deux garçons, et ces derniers se firent longuement réprimander.

« Non mais quel âge avez-vous pour vous battre de la sorte ? Vous êtes cousins merde ! Grandissez ! »

JB, en colère, parti chercher son sac et, sans prendre la peine d’éteindre la musique ou d’adresser des paroles et des excuses aux personnes présentes, se précipita vers la sortie de l’agence ! Il prit soin avant de sortir de se couvrir d’une capuche et de lunettes de soleil afin de ne pas être reconnu par les fans ou les journalistes qui pouvaient se trouver dans la rue à cette heure-ci de l’après-midi. Il n’en pouvait plus ! Son cousin lui tapait sur le système ! Le fait de ne pas réussir à faire son enchainement correctement lui tapait sur le système ! Le fait de faire partie d’un groupe lui tapait sur le système ! Le surmenage d’aujourd’hui n’aidait en rien puisque cela avait d’avantage épuisé le jeune homme et fragilisé sa sensibilité, qui était pourtant déjà très fragile…

Sur son chemin, il croisa quelques fans qui le reconnurent ; et pour ne pas salir sa réputation il leur adressa à chacune un petit salut et un sourire. Aussi, il espérait fortement qu’il n’ait pas trop de blessures visibles suite à la bagarre qu’il avait eu avec son cousin ; car il est vrai qu’il n’avait pas fait attention de vérifier son apparence avant de sortir. Déjà qu’il devait être encore tout transpirant ! Oh et puis tant pis, il n’avait pas prévu de côtoyer et de plaire à quelqu’un cette fin d’après-midi, alors au diable son odeur et son apparence !

Après plusieurs secondes de marche, alors qu’il avait la tête baissé et qu’il pestait des insultes envers son cousin, JB heurta quelqu’un qui se trouvait sur son passage. Lorsqu’il vit qu’il ne s’agissait pas d’un fan, il continua son chemin comme si de rien n’était. Il ne fallait pas abuser non plus, il n’allait pas jouer la comédie avec tout le monde… L’inconnu se mit à marmonner des mots dans un fort accent japonais, mais JB n’y fit pas plus attention que ça, tout ce qu’il voulait lui c’était qu’on le laisse tranquille. Alors, il continua son chemin tranquillement.

« Et toi...toi là...Excuse-moi mais... »

Aucune réaction de la part de JB, si ce n’est un petit soupir.

« HEY TOI LA ! Vous ne connaissez donc pas la politesse en Corée ? Quand on bouscule quelqu'un, on s'excuse, tout simplement. C'est si difficile que ça ?! »

JB esquissa un sourire moqueur. Etait-il en train de parler de politesse en Corée alors qu’on pouvait très bien entendre au son de sa voix qu’il ne venait pas de ce pays ! Nan mais de quoi se mêlait-il ?

« J’espère que tu ne comptes pas attendre, ça risquerait d’être long à venir… » Répliqua-t-il sèchement avant de continuer son chemin en accélérant le pas. On ne savait jamais, il pourrait avoir la mauvaise idée de vouloir le rattraper. Ce qui se passa d’ailleurs… L’inconnu venait de lui attraper le bras sans aucune délicatesse, serrant son poing assez fort pour que l’idole ne tente pas de s’échapper à nouveau. JB, encore sur les nerfs, se retourne brusquement et tente de frapper l’inconnu, qui esquive son poing avec agilité. Finalement JB allait rester un moment avec cet inconnu… Pourquoi fallait-il qu’aujourd’hui on s’acharne sur lui ?

La mélancolie l'avait gagné, et il n'aimait guère quand elle l'envahissait. Il ressentait tout d'un coup le mal du pays, le Japon lui manquait et surtout ses parents. Il avait toujours eu un profond attachement envers eux, et eux pour lui, sans doute parce-qu'il était leur seul fils. Il avait toujours été gâté, il devait le reconnaître, gâté et choyé comme un petit prince. Mais pas avec accès, juste avec ce qu'il fallait : avec amour. Ses parents l'ont toujours soutenu dans son choix de carrière, n'est-ce pas des parents géniaux ? Il faut dire que son père était déjà un musicien mais avait un travail à côté. C'est lui qui lui a tout appris, sa mère quant à elle, avait une ravissante voix, douce et réconfortante. Il se rappelait encore des histoires qu'elle lui racontait enfant, ses comptines amusantes qui le divertissaient avant d'aller dormir. Son père, quand il faisait un mauvais rêve, venait s'asseoir sur son lit pour lui jouer une berceuse. La vie avait toujours été belle avec eux, il était terriblement chanceux. Cela faisait déjà plusieurs mois qu'il ne les avait pas revu, depuis son départ pour la Corée. Il les appelait régulièrement pour prendre des nouvelles de la famille. Il avait parfois l'impression de tout manquer en étant loin d'eux. Mais sa mère lui soufflait que maintenant, il devait commencer à faire sa vie, faire des expériences et surtout s'amuser ! Il ne devait pas toujours penser à eux, il devait penser à lui. Oh mais il pensait à lui, puisqu'il était parti en Corée pour son groupe ! Et c'était sans doute la meilleure chose qu'il n'est jamais faite car il avait rencontré de nombreuses personnes intéressante, et il en rencontrerait sans doute bien d'autres encore. Le monde de la musique était bien vaste, et ne parlons même pas du monde du spectacle !

Sa mère le faisait rire au téléphone, elle avait toujours cette voix joyeuse. Ils avaient vraiment le même caractère mais il avait pris le physique de son père, assez grand et relativement mince. Mais il était beaucoup plus calme et posé, comme on dit les opposés s'attirent. Sa mère était persuadée que la fille qu'il aimerait serait son exact opposé... Taiki n'y avait pas beaucoup songé, mais sur le coup, ça l'amusa et il laissa échapper un rire. Il avait l'impression que sa mère voulait déjà le marier ! Ou en tout cas, elle avait déjà une idée de sa belle-fille idéale en tête, et en plus, elle avait exactement les même goûts que Taiki en matière de filles ! Elle ne manquait jamais de présenter son fils comme un futur parti idéal pour les filles de ses amies mais heureusement pour lui, elle n'était pas vraiment sérieuse, elle cherchait juste à l'embêter. Il avait deux rapports très différents avec ses parents : avec sa mère il rit énormément, ils ont vraiment la même façon de penser, la même façon de réagir et ils s'en amusent. Avec son père, c'est surtout basé sur la musique, il passe des moments calmes et ressourçant avec lui, c'est vraiment très agréable. Son calme l'apaise et le contamine. Sa propre musique change au contact de son père, elle est plus paisible et sereine, alors qu'avec sa mère elle serait plus déchaînée et incontrôlable. Ces deux genres font partie de lui et il aimait bien les avoir à porter de mains. Sa voix à travers le téléphone lui faisait du bien, et assis sur un banc, seul dans un parc, une larme rencontra le sol pour la première fois. Mais il souriait dans l'appareil pour ne rien laisser transparaître dans sa manière de parler. Il ne voulait pas qu'ils s'inquiètent, il n'y avait pas de quoi, il était bien ici et en bonne compagnie. Ils lui manquaient, c'est tout.

Quand il a finalement raccroché, après presque une heure de conversation, il est resté les coudes sur ses genoux, les mains enlacés autour de son portable et la tête penchée vers ses pieds. Il ne se sentait pas vraiment en forme, là, tout de suite. Il était déprimé et n'avait pas envie de faire grand chose. Juste... ne rien faire. Ou peut-être se mettre sous la couette et ne plus en sortir, et renvoyer bouler Kai si il osait essayer de l'en tirer ! Il essuya sa larme unique du revers de la main. Il n'avait pas honte de pleurer, ça lui prouvait juste qu'il se sentait triste ou qu'il était ému d'entendre une voix familière. Il est resté comme ça un petit moment, sans bouger, une moue sombre sur la bouche. Il soupira en rejetant la tête en arrière. Il n'était tout d'un coup pas vraiment d'humeur à parler. Quand il était triste ou seulement fatigué, il avait tendance à ne pas être de bonne compagnie, même pour jouer. Il n'y mettait pas assez de cœur, il n'aimait pas jouer de Jun dans ces moments-là. C'était rare en général, seuls ses proches connaissent son côté « mauvais poil éphémère ». Dès qu'on lui adressait la parole, il devenait piquant, même si on ne l'avait pas agressé. Si on essayait de le faire rire pour lui changer les idées, ça l'irritait encore plus ! Non non, le seul moyen de le calmer, c'est de le laisser seul et ça finit par passer, aussi vite que c'est venu. D'ailleurs, quand il est comme ça, il essaye toujours de prévenir « Attention, je suis de mauvaise humeur, alors je m'excuse d'avance. » et pitié, ne lui demandez pas ce qu'il ne va pas, parfois il n'en sait rien, il n'est pas bien c'est tout, ça arrive merde ! Dans quelques heures, il devra retrouver Kai devant l'agence pour aller en studio... Et son humeur va être des plus massacrantes, hum... pas sûr en fait, il peut changer en quelques minutes si il évite de penser à ce qui l'attriste !

Il voulait éviter d'affliger les membres de son ton désagréable, alors il accéléra sa bonne humeur à revenir très vite ! Pour cela, la musique était la plus efficace. Il attrapa son mp3 dans son sac, petit objet de bonheur et mis son casque sur les oreilles. Il se leva et en mode aléatoire, il appuya sur PLAY. Du heavy métal, outch ! Il aimait cette chanson, mais là tout de suite, c'était peut-être pas une bonne idée non ? Tout en écoutant l'introduction, il resta les yeux dans le vide, songeant ou non à changer de chanson. Elle montait en grade dès le début, la guitare violente, la batterie marquée et puissante, la basse rapide et saccadée et cette voix, claire et dominante sur la mélodie... Bizarrement, ça lui prodiguait une telle énergie, qu'il qualifierait de « noire ». Ce n'était pas une énergie très positive mais plutôt négative, tapageuse et provocante. Un sourire en coin, son menton s'agitait tout seul de haut en bas et sa moue semblait avoir disparue dans un sourire de satisfaction. Il s'était mis à marcher et s'était aperçu du changement que la musique lui avait apportait. Il y a encore quelques minutes, il était assez raplapla et maintenant, en à peine quelques secondes, il avait regagné une énergie et un tempérament d'enfer ! Mais pas très conseillé à rencontrer. Il avait toujours marché avec assurance mais là, il sentait la musique l'envahir et il se sentait tout d'un coup devenir plus fort, plus confiant mais surtout il se sentait envahi par une énergie d'une terrible arrogance. Quel drôle de sentiment. Il se sentait capable de fusiller n'importe qui du regard, sans ciller, lui qui n'aimait pas vraiment les conflits, cela paraissait étrange. Cette musique l'excitait, mais agressivement. C'était aussi ce qu'on disait du Rock quand il est apparu pour la première fois. C'était une musique qui était capable d'enflammer toute une foule. Cette excitation négative n'était pas des plus bénéfiques pour l'entourage, mais elle était très agréable pour se remonter un peu le moral !

Il devait un peu calmer son esprit et se décida à prendre un chewing-gum. Il sortir son paquet, il n'en restait plus qu'un. Il avait beau s'être arrêté pour fouiller dans son sac, son pied et sa tête s'agitaient toujours, suivant le rythme effréné des instruments. C'était jouissif. Il s'étonnait lui-même d'être dans un tel état. Décidément, le Rock et tout ce qui s'en rapportait, était vraiment pour lui.

Il allait mettre le chewing-gum dans sa bouche quand un mec le bouscula, sans s'excuser, et fît tomber l'unique dose sucrée à portée de main de Taiki par terre, et ironie du sort, en plein dans une flaque. Il resta fixé sur ce petit bout blanc qui flottait à la surface de l'eau, il ne s'agitait plus. Il était figé. Il sentait qu'il n'allait pas être commode. Aaaah, il n'arrivait pas à se contenir, non en fait il ne voulait pas se contenir. Il lâcha un juron « Fais chier... », releva la tête, se retourna brusquement vers le mec qui s'en allait et laissa glisser son casque contre son cou, la musique toujours allumée.

- « Et toi... Toi là... Excuse-moi mais... Il ne semblait pas l'entendre, ce qui l'énerva d'autant plus. TOI LA ! Vous ne connaissez donc pas la politesse en Corée ? Quand on bouscule quelqu'un, on s'excuse, tout simplement. C'est si difficile que ça ?! » cria t-il en direction du garçon blond qui se tenait à quelques mètres devant lui. »

Merde c'est vrai ! C'était si compliqué de dire « Désolé » ? Taiki était toujours poli, même trop parfois, mais c'était la moindre des choses non ? C'était tellement rare qu'il s'énerve, il avait chaud et il se sentait particulièrement tendu. Il avait entendu sa voix criée, d'un ton agacé. Monsieur impulsif, bonjour ! Ça fait longtemps qu'on s'était pas vu... L'inconnu s'était arrêté et sans se retourner, il lui répliqua sèchement « J’espère que tu ne comptes pas attendre, ça risquerait d’être long à venir… ». Il reprit sa marche, comme si rien ne s'était passé. Un sourire ironique, une rareté dans ses expresions, apparu sur son visage. T'es mal tombé toi, pour une fois, le conflit ne me fait pas peur, voilà ce qu'il pensa. Il marcha d'un pas rapide vers l'inconnu et lui attrapa fermement le bras, pour qu'il daigne lui faire face. Brusquement, celui-ci se retourna et tenta de lui asséner un bon coup de poing. Mais malheureusement pour lui, Taiki était agile et vif, et l'esquiva facilement. Il n'avait jamais vraiment eu l'occasion de se battre dans sa vie mais il avait vraiment de bons réflexes, il savait parfaitement se défendre si il le fallait. Il tira un bon coup sur le bras du garçon, afin de le rapprocher de lui, comme pour le défier à nouveau de lever son poing dans sa direction. Sous le soudain mouvement du japonais, le coréen tomba ses lunettes noires. Taiki le fixait désormais droit dans les yeux, avec cette nouvelle arrogance qui le dominait (mais jusqu'à quand ?). Il devait avoir à peu près son âge. Il le dévisagea pendant quelques secondes et remarqua que le garçon avait la lèvre inférieure ouverte, et avait une entaille à l'arcade sourcilière.

- « Ohhh... Je vois que je ne suis pas le seul à avoir subi de la violence aujourd'hui ! Vu l'état de ton visage, ce ne devait pas être qu'un problème de politesse, lui lança t-il ironiquement, d'une voix lente et prononcée. Respecte les autres et ils te respecteront. Hum... en général, ça marche pour moi. »

Il relâcha d'un geste vif son emprise sur l'inconnu et continua à le fixer, la musique résonnant toujours dans son cou. Le coréen avait l'air lui aussi sur les nerfs, il ne devait sans doute pas avoir passé un bon moment juste avant d'arriver ici. Taiki pencha légèrement sa tête de droite à gauche, signe de sa réflexion. Il commençait peu à peu à se ressaisir de sa petite colère passagère.

- « Bon d'accord, on a l'air d'être tous les deux de mauvais poil. Je suis énervé et j'ai une terrible envie de frapper quelqu'un ou quelque chose *Surpris, il se mit à rire intérieurement. Moi violent ? On le croirait pas hein, mais il en était capable en effet. Il eût un mince sourire* mais moi je me contiens, et tu devrais en faire de même, au lieu d'essayer de frapper un inconnu ! », lui dit-il en désignant sa joue qu'il avait largement manqué.

La seule habitude qui demeurait chez lui, qu'il soit de bonne ou de mauvaise humeur, c'était de parler trop. Soit c'était déstabilisant pour l'autre, soit il se moquait gentiment de lui et de sa façon de s'exprimer. il était incontrôlable. Mais sans doute dans le bon sens du terme.