Kim Young Il.

Te voilà enfin arrivée. Tu t’assois à même le sol. Il fait beau aujourd’hui, tu regardes un instant le ciel bleu avant de finalement prendre la parole.

« Bonjour maman !
Ça va ?... Moi… Ça peut aller… Je pense beaucoup à toi ces temps-ci, tu me manques maman… Tu me manques vraiment beaucoup …  Tu sais, je me suis remise au piano. Je suis toujours aussi nulle ! Il y a des choses qui ne changeront jamais faut croire. Dire que j’ai commencé à l’âge de neuf ans et que j’en ai vingt-six maintenant… »

Tu soupires. Le piano, la grande passion de ta mère, c’est elle qui t’a initié à la musique classique et ce, dès ton plus jeune âge. Car même si peu de gens le savent, tu n’écoutais que ça à une époque. Puis il y a eu le collège et ce garçon que tu adorais tant, le grand frère de ton meilleur ami qui vous a fait découvrir à tous les deux le rap. Et là, ça a été le coup de foudre. Tu n’écoutais plus que ça. Chose qui déplaisait à ton père et qui te poussait à continuer. Puis on le sait, quand quelque chose te plaît tu te donnes à fond. Et là, tu t’y es donné corps et âme. Ne vivant plus que pour ça. Tu passais ton temps libre à bosser sur ton rap, à écrire et composer. D’abord avec Dae’ et Tae’ puis finalement seule.

« J’aurais tellement aimé savoir jouer comme toi. M’enfin… Mon truc à moi, c’est plutôt le rap. Mais ça, tu le sais déjà. Par contre… Ce que tu ne sais pas, c’est que j’ai enfin dégoté un vrai job ! Je vais être professeur à la Kirin Art School et enseigner ma passion ! J’ai du mal à réaliser qu’une école de renom comme celle-ci, me propose à moi, misérable rappeuse underground, ce poste. Bon ok, j’ai une certaine notoriété mais tout de même. »

Une misérable rappeuse underground ? Toi ? Les maisons de disques se bousculaient à ta porte quand tu étais plus jeune. Ça fait quatorze ans que tu rappes et sept ans que tu montes sur scène. Alors, forcément, tu ne manques pas d’expérience. Franchement, la modestie, ça ne te va pas.

« Mais tu sais, je crois que si on m’a fait cette proposition, c’est grâce à Tae’ qui en avait marre de me voir squatter chez son frère. »

Tae’ en plus de vous avoir fait découvrir le rap. C’est votre fournisseur de bon plan, vos premières scènes, c’est grâce à lui. Aussi, il t’a préparé pour l’entretien d’embauche. Parce que mine de rien tu stressais. Oui, toi la grande Kim Young Il, tu stressais. Tu as passé des nuits blanches à lire différents articles sur la pédagogie. Toi qui as été le mentor de plusieurs jeunes. Finalement et bizarrement, quand tu es arrivée sur place tu as tout de suite décompressé. Ça passe ou ça casse mais dans tous les cas, la vie continue. Tu as été particulièrement à l’aise. Retraçant ton parcours et faisant part de tes motivations. Le but n’étant pas de dégoûter ces jeunes du rap mais de les voir se donner à fond pour faire ce qu’ils aiment. Parce que sans passion, ça s’annonce difficile. Mais pas impossible. Après tout, rien n’est impossible.

« Oh ! En fait ! Tu as le bonjour de DaeDae ! Oui, tu as dû le comprendre mais je vis toujours chez lui depuis que papa m’a foutu à la porte… Le jour de mon anniversaire… Sans un sou en poche… Décidément… Je crois que je n’arriverais jamais à lui pardonner. »

Tu étais encore jeune et bête, tes résultats scolaires étaient excellents, mais ton attitude laisser à désirer. Insolente, vulgaire, avec un sale caractère. Tu avais un comportement déplorable. Alors, voilà, ton père, cet homme que tu détestes tant, t’a jeté à la rue il y a cinq ans. Monsieur n’en pouvait plus de toi "fille indigne ". D’après lui, tu as toujours tout fait pour le décevoir. Mais il n’a jamais cherché à te comprendre. Puis, c’est lui le père indigne. Monsieur je passe ma vie dans mes dossiers. Finalement, tu as peut-être simplement essayé d’attirer son attention. Sauf que voilà, à force de jouer avec ses nerfs, ce devait arriver, arriva. Et même ta mère n’a rien pu faire. Heureusement ton meilleur ami a pu te recueillir.

« M’enfin ! Passons ! Je vais malheureusement devoir y aller... Je t’aime fort maman… Tu me manques, je suis vraiment désolé de ne pas avoir été à tes côtés à l’hôpital... Mais, vous ne m’aviez rien dit… Je ne pouvais pas savoir… Je suis désolé, vraiment. »

Ne pas pleurer. Surtout, tu ne dois pas pleurer. Tu dois être forte. Tu te lèves, jetant un dernier regard à la tombe de ta mère. Puis tu t’en vas…