Park Chae Kyeong

Je suis née dans une famille relativement normale. Enfin, de mon point de vue, ma famille est tout à fait normale et ce n'est pas faux. Ma mère travaille dans une boulangerie à trois coins de rues de la maison et mon père est comptable dans une grosse compagnie. Je suis également enfant unique. Mais ça, c'est ma famille proche. Lorsqu'on s'éloigne un petit peu, le facteur de normalité descend. Mon oncle, le grand frère de mon père, est assez connu. Il était une idole, un chanteur. Sauf que ça n'a jamais vraiment affecté la vie de ma famille en fait. Ce n'est qu'un petit plus. Ou un moins si on considère que je ne voyais pas souvent cette partie de la famille qui manquait souvent nos petites réunions.

J'ai toujours un peu caché ce lien de famille en fait. Parce que même petite, je savais que ça ne m'aurait pas aidé. Vous savez, la génétique ne fait pas toujours bien les choses. J'ai toujours pris du poids facilement. Très facilement même. Et dans un pays où la beauté est quelque chose de très important, être un peu bouboule m'a apporté bien des soucis pendant mon enfance. Je n'étais pas laide, juste rondelette. Et qui dit ronde dit pas très douée en sport. J'étais un peu la risée de ma classe, puisque je n'avais même pas les bonnes notes pour compenser mon défaut physique. Tout ça pour dire que je n'ai pas eu une enfance très facile, entre ce que les autres disaient de moi et mes difficultés à l'école. Parce qu'une chose qui ne m'aidait pas à perdre du poids, c'était que je passais mes soirées assise à étudier.

La seule chose qui me remontait le moral, c'était mes cours de violoncelle, tous les dimanches matins. Je devais pratiquer à la maison presque tous les soirs pour garder le même niveau que les autres élèves de mon cours, mais j'aimais jouer de la musique. J'aimais me laisser absorber par la mélodie, oubliant mes soucis pendant quelques minutes à la fois. J'ai commencé à apprendre à jouer de cet instrument quand j'avais environ 4 ans. C'était ma mère qui m'avait inscrite à des cours de musique et j'avais pris cet instrument au hasard, puisque je n'y connaissait rien. Je ne regrette pas du tout mon choix.

Au début du collège, j'ai décidé de prendre mon problème de poids en main. Ce n'était pas vraiment un choix venant de moi, mais plutôt suite à la pression que je subissais depuis le début de l'école. J'ai commencé à faire plus d’exercice en plus de commencer une diète drastique. Que ma mère m'a fait arrêter rapidement, puisque ce n'était pas bon du tout pour ma santé. Elle m'a plutôt apporter chez un nutritionniste, puisque même si elle ne trouvait pas que mon poids était problématique, elle voyait bien que ça m'affectait beaucoup. C'est donc ainsi que j'ai commencé à faire plus attention à mon alimentation, en plus de trouver plus de temps pour faire de l’exercice (étudier en marchant, c'est beaucoup mieux que de rester assis des heures à un bureau). Les résultats ont évidement pris beaucoup de temps à apparaitre, mais à la fin du collège, malgré toutes les fois où j'avais voulu laisser tomber, j'avais finalement atteint un poids considéré comme normal. Soit un IMC en plein dans la moyenne. Je n'étais pas aussi mince que toutes ces idoles qu'on voit à la télé et dans les magazines (je ne le serai jamais), mais je n'avais finalement plus honte de porter un maillot de bain devant les autres. Et même s'il faut encore que je fasse très attention à ce que je mange, c'est fou comme ça m'a fait du bien. Ça m'a redonné un peu de confiance en moi.

Entre temps, mon cousin, fils d'idole et que je ne voyais malheureusement pas souvent, avait à son tour commencer une carrière à la White Entertainement. Je l'avais toujours un peu admiré, à être capable de faire tout ce qu'il faisait, alors que j'arrivais à peine à balancer l'école et mon cours de musique en y mettant tous mes efforts. Je ne me rappelle plus trop quand j'ai décidé de me donner comme but d'être acceptée à la même école que lui, à Kirin. Mais je me souviens très bien qu'après, je n'avais plus que ça en tête.

Il est donc évident que j'ai passé l'audition dès que j'ai pu. Dit comme ça, on dirait que ça s'est passé facilement, mais c'est loin d'être le cas. Même si j'avais comme but d'aller à Kirin Art School, j'avais en même temps peu confiance en mes capacités à être acceptée. Qu'est-ce que je devrais faire à l'audition? Qu'est-ce que je devrais porter? Comment réagir si je suis refusée? Est-ce que j'ai une chance d'être acceptée? Bref, j'avais autant envie de faire l'audition que je redoutais ce moment. J'ai quand même passer tout mon temps libre à travailler sur une composition. Parce que s'il y avait bien une petite chose que je considérais comme un talent, c'était d'être capable d'écrire mes musiques. Mais j'ai énormément hésité avant de décider que c'était ce que j'allais faire pour l'audition, parce que je savais que si j'étais refusée, je n'allais pas pouvoir créer pour un très long moment. Avoir son travail jugé insuffisant n'est pas bon pour quelqu'un n'ayant déjà pas beaucoup d'estime de soi.

Vint le jour de l'audition. Je ne pensais pas qu'atteindre un tel niveau de stresse était possible. Je m'étonne encore de ne pas avoir perdu connaissance en arrivant devant le jury. Surtout qu'en réalisant que c'était la première fois que je jouais devant des gens que je ne connaissais pas, j'ai figé pendant au moins 10 secondes, avant qu'on me rappelle à l'ordre en me demandant de me présenter. À partir de ce moment, c'est l'adrénaline qui a pris la relève, alors mes souvenirs de ma performance sont assez flous. Je sais que j'avais décidé de jouer une composition montrant tous ce que je savais faire avec mon instrument, mais je ne pourrais pas dire comment j'ai joué, si j'ai fait des erreurs. Je pense que je peux quand même me fier aux réactions des juges pour dire que je ne me suis pas si mal débrouillée, puisque j'ai été acceptée dans cette prestigieuse école.

Ça fait donc quelques mois que je suis dans ce milieu qui ne me correspond pas vraiment. Ok, pas du tout, je l'avoue. Je ne me sens pas vraiment à ma place entourée de tous ces gens talentueux et beaux. Surtout que j'ai l'impression qu'il n'y a pas beaucoup de personnes ne suivant qu'un seul cursus, sans cours d'option. Mais même si je fais de mon mieux pour me faire des amis, je n'essaye pas de m'adapter à cet environnement. Enfin, oui, un peu, mais je n'ai pas envie de changer, autant physiquement que mentalement, juste pour être mieux acceptée. Je me doutais bien que ce n'était pas un milieu fait pour moi, mais j'ai quand même pris le risque de passer l'audition. Et maintenant que je suis ici, je ne veux pas arrêter tout de suite.